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Les chevets de kerlaz - Page 4

  • Gérard MORDILLAT - Vive la sociale

    Un bel hommage au XXème

    "Que serait Paris sans le XXème arrondissement ?
    Rien, un trou, une béance, un être incomplet en dix-neuf morceaux une ville ridicule.
    La ville entière repose entre les bras puissants de Belleville et de Ménilmontant. Si l’un des deux venait à lâcher, la catastrophe serait inévitable. Celui qui n’a jamais coursé les filles entre la rue Sorbier et la rue de la Bidassoa, jeté des oeufs sur les passants du haut de la rue Villiers de l’Isle-Adam, flâné rue des Cascades, maraudé passage des Entrepreneurs ou rue de la Cloche, peut toujours s’arracher les yeux d’admiration devant la tour Eiffel, le Louvre, l’Arc de Triomphe et autres plaisanteries mineures, il ne comprendra jamais rien à Paris, s’il ne comprend rien au XXème arrondissement. Le XXème n’est ni un paysage, ni une curiosité, ni un circuit touristique c’est un état d’esprit. Et ça ça ne s’explique pas."

  • Jean HATZFELD - La stratégie des antilopes

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    De savoureuses réflexions sur les us et coutumes au Rwanda...et dans toute l'Afrique .

    …Rien n’est plus repérable dans la campagne rwandaise que des Kigalois : coiffure congolaise, escarpins à hauts talons instables, maquillage criard malmené par la poussière, cravate noué et costume sombre malgré la canicule. Dans le monde entier, les métropolitains aiment à cultiver leur élitisme, mais dans aucun autre pays ils mettent autant de soin à éviter tout risque de confusion entre eux et les provinciaux qu’ils visitent…


    …A huit heures, une ribambelle d’écoliers affluent de tous côtés, filles en bleu, garçons en kaki, et sortent du village vers l’ancien triangle colonial : les trois bâtiments en brique cuite de l’école, l’église et la maison communale, autour un terrain caillouteux où les gamins jouent au foot toute la journée. Les plus costauds monopolisent le ballon en cuir de l’école, lequel voltige au gré des vagues de joueurs qui affluent du lever au coucher du soleil, tandis que les petits usent des balles en feuilles de banane ficelées. Des petits virtuoses se livrent à des jongleries qui laisseraient bouche bée les recruteurs de nos centres de formation…


    …A Nyamata les gens sont passés directement, en quelques mois, du téléphone public colonial, unique et grésillant, de la Poste, où l’on attendait son tour pendant des heures avant d’obtenir une communication à peu près audible de quelques poignées de secondes, aux téléphones portables et messageries e-mail, sans avoir connu téléphones filaires, fax, répondeurs ou minitels. Ils n’en éprouvent aucune gêne, mais pas davantage de fascination ni de jouissance spéciale.
    L’Africaine a inventé la pagne. Plus géniale invention que le pagne, vous en trouverez peu. Le pagne est le drap multicilore sur lequel on se couche, celui dont on s’enroule dans la froideur de la nuit. Il est la serviette après les ablutions, la jupe qu’on noue autour des hanches au réveil, le châle qu’on pose sur l’épaule à la saison des pluies. Le pagne enveloppe le petit sur le dos, sert de baluchon pour se rendre en ville ou en voyage. On l’étale sur l’herbe ou dans la cour pour bavarder entre copines, on l’accroche aux fenêtres pour la sieste.
    Les pagnes garnissent les trousseaux, accompagnent les réfugiés dans les camps, les immigrés dans leurs foyers. Ils fleurissent les rues de Montreuil au printemps, embellissent les photos souvenirs des conférences internationales. Ils sont des cadeaux toujours plaisants. Ils sont beaux, pas chers, solides, taillables et corvéables à merci. Pourtant, ils ne peuvent empêcher l’invasion des tailleurs, costumes, sacs, valises, volets, poussettes, tapis, serviettes made in china qui se répandent sur les marchés africains…

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    Innocent Rwilili « …Le Blanc ne devine pas comment il est envié par les Africains, en tout cas par les Africains des campagnes ; et comment il est craint. Par exemple, tu vois une assemblée de mille personnes qui se tient dans un village, avec des notables, des professeurs, des personnalités, des gens très bien habillés, accompagnés de leurs épouses brillantes de tous leurs bijoux. Bon, un Blanc passe là par hasard. Il porte une chemise et un pantalon froissés, pieds nus dans ses sandales. Personne ne sait ce qu’il sait, ce qu’il pense ou ca qu’il possède, mais l’orateur va bien s’arrêter de parler en le regardant ; le Blanc va être plus respecté que n’importe qui dans l’assemblée jusqu’à ce qu’il disparaisse dans le chemin… »

  • LE POURQUOI-PAS ? DANS L'ANTARCTIQUE

    Ce livre de Jean-Baptiste CHARCOT je l'ai lu il y a quelques mois.
    C'est un récit de voyage dans l'Antarctique entre 1908 et 1910. Il est construit sous forme de notes quotidiennes quelquefois répétitives mais toujours intéressantes.

    Quelques passages très forts, un exemple :

    ".Un peu avant 3 heures, le soleil se lève et les effets de lumière deviennent merveilleux. Certains icebergs sont colorés en pourpre, d'autres en violet, d'autres prennent l'aspect de masses de fonte en fusion, tandis que quelques-uns sont bleus ou d'un blanc d'argent éclatant. Tout le pack-ice est teinté de rose, et il est difficile d'imaginer quelque chose à la fois de plus beau et de plus fantastique."

    Quelques passages déroutants, un exemple :

    ".La bande de banquise qui nous protège du mauvais temps des régions est et des grands et nombreux icebergs étant prête à se rompre, nous serions obligés, en admettant même que nous échappions à ceux-ci, de suivre la lisière de la banquise dans son recul, nous éloignant ainsi de plus en plus de l'île où seulement nos observatoires pourraient être établis, et j'ai tout lieu de croire que nous ne pourrions pas longtemps soutenir la lutte nécessaire à la sécurité du bateau."
    On retrouve plusieurs phrases de ce type...difficiles à saisir.

    En lisant ce livre j'ai eu l'impression de faire un très beau voyage mais avec quelques obstacles...des mots inconnus de ma part et de quelques dictionnaires. Je vous les cite en les mettant dans leur contexte :
    - newcastle : ...un baleinier nous apporte en vrac, sur son pont, 16 tonnes de newcastle le matin, et, pour ne pas perdre de temps, un autre nous en apporte 14 le soir...
    - icebloc : ...Nous devons de temps à autre éviter quelques icebergs et iceblocs, mais si espacés qu'ils ne sont pas gênants... (je pense que ce sont de gros blocs de glace)
    - floes : ...nous nous engageons dans le chenal Peltier sans trop de difficulté, malgré les floes nombreux et assez importants qui l'ont envahi...
    - dépousser : ...Nous sommes maintenant entourés d'iceblocs importants qui frappent violemment contre le bateau et qu'il faut continuellement dépousser...
    - mégalestris : ...Je grimpe au sommet de ce récif noir et sinistre habité par un couple de mégalestris... ( je pense que ce sont des oiseaux, mais lesquels ?)
    - hummocks : ...la glace devient alors tout à fait compacte, formées de grands floes serrés qui s'appuient sur la côte et semblent déterminer des hummocks de pression...
    - Weddels : ...Il y a beaucoup de phoques sur la banquise, des crabiers et des Weddels...
    - ratingage : ...des houles se contrariant en venant du S-W, du N-W et du N-E déterminent un ratingage des plus désagréables...
    - iceblink et drift-ice : ...cette clarté est tout simplement produite par l'iceblink d'une large plaque de drift-ice...

    Et si vous trouvez la définition de ces mots, un petit commentaire me fera plaisir.

  • Alain Defossé - RETOUR A LA VILLE

    Des moments ordinaires dans sa ville…Nantes

    Dimanche :
    « …Le circuit des familles dans le centre, leur pas mesuré au long des boulevards, se perpétueront en eux, malgré eux, cette procession dans le gris, ces arrêts obligés devant tel ou tel magasin fermé, comme on irait chaque semaine fleurir les tombes… »

    La rue inévitable :
    « …crébillonner : monter la rue (puis la descendre sur l’autre trottoir), ou la descendre (puis la remonter sur l’autre trottoir) en regardant toutes les vitrines, commentant les articles et les prix, tout en poursuivant parallèlement une conversation futile, de préférence décousue, et en observant, dans le dixième de seconde, tous les gens que l’on croise, cela sans se départir de cette allure vive, un peu brutale, qui est – qui était – ici la règle, et ce plusieurs fois de suite, éventuellement , selon la saison, l’état du ciel, l’humeur du moment. Ce n’est pas là une aprade vaniteuse de petite ville provinciale ; c’est une technique… »

  • ...autres voluptés sportives de Philippe DELERM

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    Ce titre est incomplet, mais les meilleurs moments de ce livre n'étaient pas dans la tranchée d'Arenberg...Les voici :


    You’ll never walk alone

    Les Reds de Liverpool ont davantage que des supporters : des milliers d’officiants pour une messe en l’honneur du dieu Football, qui sublime toutes les cheminées d’usine, et les mélancolies poisseuses du chômage.

    Dans les clubs anglais, les spectateurs sont tout près du jeu,au ras de la pelouse. On croit aux joueurs pour croire un peu en soi. Quand ça va mal, on chante : « you’ll never walk alone »


    Ils connaissent le film

    Ca n’a l’air de rien, mais ce n’est pas évident de descendre rapidement d’une chaise d’arbitre quand tout un central, quand toutes les cameras de la télévision se focalisent sur vous. Il faut se lever, se retourner, aborder les échelons sans se casser la figure. La silhouette a beau être déliée, elle fait contraste avec les chassés-glissés des virtuoses de la terre battue.


    A la cinquante-sixième

    Vite on apporte la civière. Et c’est là…Michel Platini, un peu voûté,a pris la main de Battiston, escorte la civière jusqu’à la ligne de touche. On voit qu’il parle à son coéquipier, on devine qu’il lui parle. « T’en fais pas, ça va aller », ou bien « Ce match, je te promets qu’on va le gagner ! »…

    C’est un très joli soir d’été, un soir de chaleur, de vacances...

    A la cinquante-sixième minute de la demi-finale Allemagne-France meurt la France de Poulidor, celle où le cœur bat plus fort pour celui qui perd en beauté.


    Loulou dans la piscine

    En 1990, le Racing, après prolongations, a eu le bon goût de se faire battre par Montpellier. Nicollin seul était conçu pour prononcer à la perfection « putain les mecs » attendu du dirigeant qui s’ébroue, ridicule et ravi, cheveux collants, costume dégoulinant, triomphant et résigné. On aura vu Loulou dans la piscine.


    Le multiplex

    Le multiplex, c’est comme un livre. On se la crée, cette petite pluie qui crachine sur Geoffroy-Guichard, cette moiteur maritime qui souffle sur La Beaujoire quand le correspondant garde l’antenne pour le corner.


    Vikash un peu ailleurs

    A Lyon, Paul Le Guen avait sous la main ce trésor fragile : la possibilité de faire jouer ensemble Carrière et Dhorasoo, le bonheur absolu de l’intelligence. Mais il a préféré des malabars et, bien sûr, au plan comptable,il n’aura pas eu tort.


    Triomphe à l’ombre

    Mais il y a ce moment, juste avant d’entrer dans le stade, le gagnant sait qu’il va gagner. Une zone d’ombre se dessine, tunnel anonyme sous les tribunes. Un arc de triomphe en béton brut de décoffrage. Au-delà, un haut rectangle de lumière éclabousse l’avvenir si proche, une rumeur encore imperceptible et dont il sait qu’elle va s’enfler, déferler dès qu’il apparaîtra.